SERVICES PUBLICS, UN ENJEU POUR L’ÉGALITÉ ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES

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Depuis 2019 et le développement de la pandémie, la fragilité de notre système de santé mais aussi celle de l’Éducation nationale, de la prise en charge des personnes dépendantes ont été révélées au grand jour, même si de fait ces dégradations remontent à plusieurs décennies. Depuis les années 1990 en effet, dans le cadre des politiques néolibérales adoptées à Bruxelles avec le soutien actif des pays membres de l’Union européenne, une des obsessions majeures des gouvernements a été de réduire les activités couvertes par le secteur public, pour en ouvrir le champ - et les opportunités de profit - au secteur privé, et ce, au nom du dogme de l’efficacité du marché par la dite « concurrence libre et non faussée ». Des normes ont ainsi été instaurées pour limiter les dépenses publiques. Des entreprises publiques ont été privatisées ou ouvertes à la concurrence.

Cette marchandisation des services publics s’est traduite, outre la réduction des services rendus, par un recours accru à la sous-traitance, l’introduction de règles de gestion empruntées directement au secteur privé, dans une perspective
de « rentabilisation » des services (comme la T2A, tarification à l’activité, à l’hôpital). Dans ce cadre de restriction budgétaire, la politique hospitalière a notamment abouti à supprimer des milliers de lits (75 000 lits d’hospitalisation complète entre 2003 et 20191, soit une baisse de 16 %), tendance qui se poursuit au profit des soins ambulatoires. En lien avec l’objectif de réduction des dépenses publiques, toutes les démarches administratives ont été progressivement
« dématérialisées » et numérisées, ce qui pénalise gravement les personnes les plus précaires ou les plus âgées. Résultat de toutes ces procédures : des employé·es épuisé·es qui ne parviennent plus à remplir leurs missions, des usagers et usagères perdu·es et maltraité·es, et la solidarité censée être portée par les services publics… en grave régression !

• Les femmes en première ligne

Cette désagrégation des services publics affecte les populations les plus modestes, et elle touche particulièrement les femmes. La fonction publique est en effet majoritairement féminine : 63 % de femmes en 20192, et même 78 % dans la fonction publique hospitalière où elles sont notamment infirmières, sage-femmes, puéricultrices, aides-soignantes.

Elles représentent 71 % des enseignants de l’Éducation nationale. Elles sont plus souvent à temps partiel que les hommes (28,5 % d’entre elles, contre 11 % des hommes).

Dans la plupart de ces professions, les salariées ont tiré la sonnette d’alarme pour dénoncer leurs conditions de travail marquées par l’alourdissement des charges de travail pour des effectifs insuffisants et des salaires très en retard sur la
moyenne européenne. Ces conditions se sont encore aggravées dans le contexte de la pandémie avec le départ de collègues qui n’en peuvent plus ou ne perçoivent plus le sens de leur travail… Des mobilisations massives des enseignant·es ont alerté sur cette situation en janvier 2022.

Dans tous ces secteurs, l’État compte depuis des décennies sur le sens du « dévouement » des femmes, réputées avoir choisi leur profession par « vocation » en priorisant l’idée de se rendre utiles à la société. Mais aujourd’hui la limite a été atteinte. En cette période de crise sanitaire, la majorité de ces salarié·es ont poursuivi leur travail au risque d’y perdre leur santé… tandis que les Français les plus riches ont continué d’accumuler les profits.

Ce texte traite des services publics de soin (santé, petite enfance et perte d’autonomie) sous un éclairage de genre. Sans être exhaustifs, ces trois secteurs représentent un enjeu majeur de société pour répondre à l’exigence d’égalité entre les femmes et les hommes et construire un État social favorisant l’émancipation.

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Les services publics, à développer et améliorer, sont un outil pour la réalisation des droits humains et l’intégration des enjeux écologiques. Seule une socialisation et une prise en charge par des services publics de qualité peuvent répondre aux besoins des jeunes enfants et des personnes âgées ayant perdu leur autonomie, permettant ainsi aux femmes d’avoir un emploi et d’accéder à l’autonomie financière indispensable à l’égalité. Il y a donc un fort enjeu pour les femmes, comme pour la société, de mettre en place de véritables filières professionnelles qualifiées et revalorisées - qui doivent sortir du label « féminin » -, et de penser tout ce secteur des soins (le care) à l’aune de cet objectif. Il est indispensable de reconnaître l’importance de toutes ces activités pour le bien-être collectif.

 

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