GT du 7 décembre 2022 : Agents en charge du contrôle fiscal - Déclaration liminaire

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Par rapport à l’intitulé de cette réunion, nous précisons d’emblée que la CGT Finances publiques entend ouvrir la question à tous les fonctionnaires au contact avec les usagers et victimes de violences diverses, car c’est avant tout en tant que fonctionnaire que notre collègue a été tué.

Pour la DGFiP, nous tenons à ouvrir les réflexions, au-delà des vérificateurs ou enquêteurs, à tous les agents en contact avec les usagers, donc également aux huissiers, aux agents d’accueil, du recouvrement, du contentieux, aux géomètres, etc.

En effet, même si le fait d’aller dans les locaux des contribuables expose différemment les vérificateurs et enquêteurs du Contrôle fiscal, toutes les missions sont à risque et les agents les exerçant sont aussi des cibles. Nous demandons l’ouverture d’un cycle de discussions globalisé.

La CGT Finances publiques rappelle que, si rien ne justifiait les évènements du lundi 21 novembre, la violence grandissante envers les fonctionnaires et au cas particulier des Finances publiques se nourrit aussi de la portée des propos de responsables politiques, et en premier lieu de ceux en responsabilité. Tout ce qui atteint le consentement à l’impôt par des attaques continuelles, le fonctionnaire « bashing », l’assimilation d’un fonctionnaire à un coût social, et ce depuis des années, participe au dénigrement qui décomplexe et cautionne les actes de violence inadmissibles que les personnels de la DGFiP, mais pas qu’eux, subissent tous les jours.

Nous ne sommes pas responsables de la violence des politiques économiques et sociales du gouvernement.

A ce sujet, la disparition des CHS-CT et surtout la mise en place des CSA et FS nous posent encore, à ce jour, de nombreuses interrogations.

Le sentiment d’injustice fiscale est criant : entre la crise Covid, l’inflation, les coûts énergétiques, les entreprises, surtout les plus petites, sont souvent en situation précaire et en grandes difficultés financières, elles sont souvent défaillantes, sans comptable et comptabilité, sans grande disponibilité… A l’autre bout de la chaîne, on a des comportements politiques peu exemplaires, y compris jusqu’au plus haut sommet de l’État. Les propos du président de la république sur la « douille » sont encore très présents dans nos esprits.

Quand les salaires stagnent, que le chômage augmente, mais que les prix montent, les services publics protègent normalement les plus faibles. Or les services publics sont de moins en moins nombreux, faute d’effectifs, et de moins en moins efficaces, alors que les impôts ne baissent pas. Les ingrédients sont finalement tous là pour que la tension augmente entre la DGFiP et les contribuables…

La population fiscale est très différente entre les BDV et les DNS et ce sont les vérificateurs des petites entreprises qui courent le plus de risques, car les rectifications amènent des conséquences financières directes sur la vie des contribuables.

De plus, les vérifications arrivent souvent après les faits examinés et les conditions financières et familiales peuvent avoir évolué, ce qui peut rendre la perspective du recouvrement très compliquée.

Les milliers d’emplois supprimés à la DGFiP depuis la fusion, y compris dans le contrôle fiscal, les suppressions d’implantations fiscales, la relation de confiance, laissant croire au contribuable que les contrôles sont une incursion inadmissible dans sa vie et dans ses comptes, ont également préparé le terrain.

Le gouvernement et la DGFiP sont donc largement responsables du climat délétère envers les fonctionnaires et les corps de contrôles, nous avons d’ailleurs maintes fois tiré la sonnette d’alarme !

Le datamining et la casse des services de programmation (PCE, BCR et des SIE de proximité) nuisent de manière générale aux informations fournies aux vérificateurs.

De même, la course à la statistique complique les relations avec les contribuables.

Les documents que vous nous avez transmis ne prennent pas pleinement la mesure de la situation.

La CGT Finances publiques revendique en tout premier lieu :

— la création de postes dans tous les services, afin de permettre à la DGFiP de remplir sa mission de service public, en interne vis-à-vis des contribuables et en externe vis-à-vis des autres services publics

— la réimplantation de structures en masse pour couvrir de nouveau l’ensemble du territoire

— votre intervention auprès du gouvernement pour faire cesser le bashing anti fonctionnaires et anti impôt

— une plainte contre toutes les incitations à la haine, même anonymes.

Techniquement, les procédures existantes sont quasiment suffisantes ; il suffirait déjà de les appliquer… Malheureusement, ce sont déjà les conclusions tirées en 2013 lors du groupe de travail ayant succédé à l’assassinat d’un vérificateur à Marseille… La CGT Finances publiques revendique donc :

— Une réelle utilisation des fiches de signalement, qui font aujourd’hui trop souvent l’objet d’un classement sans suite, voire même de suspicion envers l’agent (a-t-il bien géré la situation, a-t-il anticipé, a-t-il suivi le stage « gestion des conflits »?). En effet, certains contribuables, mais aussi leurs comptables, sont de plus en plus agressifs envers les vérificateurs, remettant en cause leur action, leurs compétences, étant trop tatillons, etc). Nous insistons sur le nécessaire refus du moindre comportement agressif ou violent, tant verbal que physique, nous revendiquons clairement la tolérance zéro. Les collègues qui ont témoigné auprès de nous sont unanimes sur le sujet : les directions locales admettent beaucoup trop les violences verbales, voire même les « petites » violences physiques, espérant ainsi ne pas nuire à la « relation de confiance » de la Loi ESSOC et aux indicateurs du « contrôle apaisé »… Or, non seulement la multiplication de « petites » violences est délétère pour les conditions de travail des agents directement au contact de ces usagers, mais en plus celles-ci préparent le terrain à des violences beaucoup plus graves.

Les femmes subissent plus de pressions et de violences que les hommes et font de plus en plus souvent l’objet de tentatives d’intimidations, y compris pas écrit. Et certains chefs de service estiment qu’elles ne savent pas se faire respecter. Les mentalités doivent changer, cela s’appelle tout bonnement du sexisme…

— Idem pour l’opposition à fonction, pour laquelle l’administration ne va pas jusqu’au bout, par crainte de caractériser l’opposition en tant que telle.

Nous souhaitons d’ailleurs connaître le nombre d’article 40 et d’oppositions à fonction.

— Quant à l’accompagnement des agents victimes d’agression, les rappels à la loi restent internes à la DGFiP ; nous estimons qu’ils devraient être systématiquement suivis d’un article 40 au procureur de la république et que les agents agressés soient aidés par leur administration.

— Enfin, nous reprenons à notre compte les revendications du CHS-CT de la Haute-Garonne tenu suite au drame du Pas-de-Calais :

— pour les accueils de proximité : sécurisation des bâtiments, parking privatifs, flux de circulation sécurisés, processus d’alerte identifiés, et un lien réellement établi avec les autres administrations.

— pour les accueils des services : arrêt immédiat des voltiges en extérieur ; des agents de sécurité positionné sur leur seule mission ; engagement de pérennisation des agents de sécurité sur tous les sites avec une fréquentation importante (à deux selon les besoins) ; une réelle prise en compte de la problématique amende qui nécessite absolument de véritables réponses en moyens ; améliorations effectives des espaces d’accueils ; un rappel sur les possibilités de communication « anonymisée » des personnels.

— personnels d’accueil en général : mettre en œuvre immédiatement la possibilité d’anonymisation pour celle et ceux qui le demandent.

— Pour terminer, nous souhaitons que toutes les directions conduisent des réflexions avec l’ensemble des agents en contact avec les usagers sur la sécurisation de leurs interventions. Par exemple, nos collègues huissiers de Haute-Garonne, qui se rendent seuls chez les redevables sans être accompagnés, sauf cas particulier, ont établi une procédure d’appel téléphonique avant intervention puis, qui les sécurise et permet au collègue « en vigilance » au téléphone d’alerter la police ou la gendarmerie si besoin, procédure validée par leur hiérarchie. C’est ce type de cas concrets que nous souhaiterions voir évoqués et mutualisés par ces réunions en territoires.

— Cette revendication est prolongée d’une demande de création d’un observatoire des violences, agressions et évènements graves.