GT du 2 décembre 2021 : Actualités du contrôle fiscal et du service de la sécurité juridique - Compte rendu

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L’administration avait convoqué à un GT sur l’action pénale à la DGFIP afin de dresser de bilan de la loi de la lutte contre de la fraude du 23/10/2018 dont les mesures principales sont :

 L’instauration de dénonciations obligatoires aux procureurs de la République pour les affaires ayant donné lieu aux pénalités administratives les plus importantes,

 La suppression de l’avis de la Commission des infractions fiscales (CIF) pour les affaires de présomption caractérisée de fraude fiscale,

 La suppression de la plainte préalable de l’administration fiscale pour la poursuite des fraudes fiscales connexes à des procédures déjà en cours,

 La possibilité de recourir à la Comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) pour les personnes physiques et morales, mais également à la convention judiciaire d’intérêt public (CJIP) pour le délit de fraude fiscale,

 Le renforcement des sanctions, notamment avec la mise en place de la publication systématique des sanctions pénales, l’aggravation des amendes pénales encourues,

 La création d’un Service d’enquêtes judiciaires des finances (SEJF) fraude.

Dans notre déclaration liminaire, la CGT Finances Publiques a constaté qu’en dépit de ces évolutions, les révélations sur la fraude fiscale se multiplient (PANDORA PAPERS , CUM CUM, LUXLEAKS, PANAMA PAPERS ou OPEN LUX) et qu’aujourd’hui ces scandales sont mis à jour par des consortium internationaux de journalistes.

Pandora Papers, optimisation fiscale, évasion fiscale, fraude fiscale sont des « sports de riches » qui volent les finances publiques, spolient les services publics. Ces fraudes coûtent 100 milliards d’euros au budget de l’état, soit plus du tiers des rentrées fiscales.

Alors que l’évasion fiscale n’a jamais atteint un niveau aussi important, les moyens alloués au contrôle fiscal en personnel sont en diminution. Pire, avec la mise en place de la loi ESSOC et la la création de l’examen de conformité fiscale, l’Etat se désengage !

Pour la CGT Finances publiques, l’efficacité de la lutte contre la fraude fiscale passe par un renforcement des moyens humains, budgétaires et techniques de l’ensemble de la chaîne de contrôle intégrant la globalité des missions.

Dans sa réponse aux différentes déclarations liminaires, le chef du contrôle fiscal a estimé que le contrôle fiscal a moins souffert que les autres missions de la DGFIP en matière de suppressions d’emplois et que tous les ans la DGFIP doit justifier devant la représentation nationale l’allocation de ces emplois. Les révélations de ces scandales sont surtout liées à un problème d’information et les échanges automatisés d’informations ont permis d’améliorer la détection des mécanismes d’évasion fiscale.

La DGFIP avait beaucoup oeuvré pour amender la loi pour la confiance dans l’institution judiciaire notamment sur le secret professionnel des avocats afin qu’il n’entrave la lutte contre la fraude fiscale.

Toujours selon le directeur, les métiers du contrôle fiscal souffrent comme les autres métiers à la DGFIP au niveau de leur attractivité.

Le chef du contrôle fiscal a répété une nouvelle fois que sur la période il n’y avait pas de tyrannie des objectifs et que l’appel au volontariat pour les autres missions doit être pris en compte (participation au fonds de solidarité). Toutefois, il a admis un risque de perte en ligne dans les déclinaisons en local.

Par ailleurs, en dépit de 2 années compliquées, les chiffres du contrôle fiscal au 30/09/2021 sont bons et même meilleurs que certaines années.

Le rapport de la cour des comptes sur la fraude aux prélèvements obligatoires publié fin 2019 a recommandé d’engager dans l’ensemble des administrations des travaux réguliers d’estimation de la fraude. Pour la DGFIP, il est attendu de procéder à l’évaluation du manque à gagner en matière fiscale, et notamment de la TVA. Ainsi, 500 contrôles d’entreprises vont être engagés, mais aucune pression calendaire n’a été imposée aux services chargés de ces contrôles.

Les appels à candidature au SEJF ou à la BNRDF sont terminés pour le SEJF et toujours en cours pour la BNRDF, faute de candidats.

Le chef du contrôle fiscal estime satisfaisante la formation professionnelle de l’ENFIP et se demande s’il faut imposer un parcours de formation continue aux nouveaux agents ou les laisser en décider.

Enfin, sur les délais de séjour sur les métiers du contrôle fiscal, le directeur fait valoir que les spécificités du contrôle fiscal imposent une certaine stabilité, mais que d’autres impératifs, notamment déontologiques, sont de nature à justifier la mise en place un délai de séjour. Un délai maximal de 10 ans sur un même poste de CF lui paraissant une norme correcte.

Puis l’examen des 3 fiches a débuté avec des précisions orales des différents chefs de bureau présents.

Ainsi, la réforme du « verrou de Bercy », qui s’est traduite par la mise en place d’un mécanisme de dénonciation obligatoire au procureur de la République des contrôles fiscaux répondant à certains critères de gravité, a permis une augmentation substantielle des saisines de l’autorité judiciaire puisqu’en 2019, 1 678 dossiers fiscaux, dont 965 dénonciations obligatoires, ont été transmis aux parquets, soit le double du nombre de plaintes pour fraude ou présomption de fraude fiscale déposées en 2018. Malgré le contexte sanitaire, l’administration  fiscale aura également saisi les parquets de 1 272 dossiers fiscaux, dont 823 dénonciations obligatoires, en 2020.

En ce qui concerne le SEJF et la BNRDF, les enquêtes finalisées au titre de la procédure judiciaire d’enquête fiscale depuis sa mise en place il y a dix ans ont permis la fiscalisation à hauteur de 755 M€ de droits, pénalités et amendes au 31 décembre 2020, correspondant à 247 plaintes déposées.

Cette coopération avec le Ministère de l’intérieur se traduit à la fois par des échanges d’informations et par la mise à disposition de près de 130 agents dans divers services du ministère de l’Intérieur (GIR, BNEE, BNDRF).

La coopération avec la Justice se matérialise également par les contacts réguliers qu’entretiennent la DNEF et les services centraux de la DGFiP en charge des contrôles coordonnés avec l’autorité judiciaire et notamment avec le parquet national financier (PNF).

La DGFiP met à disposition des (JIRS) une vingtaine d’agents ayant la qualité «d’assistants spécialisés.

Sur le soutien en matière d’action pénale, il est principalement méthodologique (fiches techniques, WIFIP, guide méthodologique).

Comme on pouvait s’y attendre, le bilan dressé est idyllique, mais cache mal la réalité de la DGFIP, notamment en matière de contrôle fiscal. Pour faire le parallèle avec la Police, lorsque les pouvoirs publics ressentent une hausse de la délinquance, des policiers sont recrutés ; alors que les révélations de scandales d’évasion fiscale se multiplient, aucune action en matière de recrutement de personnels n’est engagée à la DGFiP.

Pour la CGT Finances publiques, c’est bien sur l’expertise fiscale que doit très largement s’appuyer l’enquête judiciaire, car elle est de plus en plus confrontée à des mécanismes particulièrement complexes pensés pour dissimuler la réalité fiscale. Ce développement de  l’expertise fiscale est en contradiction avec les réformes actuelles à la DGFIP (délai de séjour, réforme de la scolarité initiale, multiplication des repères d’activités).

Ainsi, les compétences acquises par nos collègues proches de la retraite risquent de ne pas être transmises. C’est une catastrophe, d’autant plus que les concours de la fonction publique connaissent une réelle désaffection de la part des jeunes diplômés.

La CGT Finances Publiques est aussi revenue sur la protection juridique des agents et elle a sollicité qu’un guide méthodologique soit élaboré pour alerter les collègues sur leurs droits en cas d’audition ou d’attaques devant la justice (soutien, préparation, voire  accompagnement de leur hiérarchie).